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Elina Salminen carries the question of perception as a watermark on the surfaces she moves into. Her work oscillates between installation in situ and paintings as objects. Through a subtle play of surfaces, she creates works that have to be approached through the spectre of time and space. Through a play of sometimes barely noticeable shades of colour, screens, revelations and erasures, it takes the eye some time to recognise what it sees and what it comprehends… An intelligence of measure and of minimal form, objects/surfaces found or rather arranged: all of Elina Salminen’s work is dis-covered both literally and figuratively. / Stephan Balleux
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Échos d'une couleur
A ceux qui parlent du hors-champ de la peinture, de sa délocalisation – au delà du châssis, de son dépaysement, Elina Salminen propose une autre réponse. Moins orgueilleuse parce que moins spectaculaire, celle de la verticalité. Comment la peinture sort tout simplement d'elle-même ? De cela naît le nimbe ou l'aura selon les références que l'on se choisit. Elina Salminen honore la couleur en contrant la matérialité qu'on lui assigne. Et si la peinture, c'était ne pas voir de la peinture, mais assister à l’apparition d'une sensation qu'on appellera couleur. Une sensation, autant dire un moment d'être.
Plus que qu’est-ce que la peinture ? : qu’y a-t-il derrière la peinture ? Que cachent les aplats, que recouvrent-ils ? Y a-t-il un dessous de la toile ? Sans considérer toute œuvre comme le champ funèbre de bien d’autres déclarées non possibles par la main du peintre, sans croire davantage que tout livre est un palimpseste, nous en venons face à l’avancée de plus en plus grande de la couleur en reflets immatériels (rien ne l'est ?), en touches rectangulaires, en lignes massives, jusqu’à être un volume, invasion, vague déferlante, univers entier, à nous demander ce que, si la peintre ne veut plus montrer. Peut-être pour que nous voyions mieux.
Ne plus montrer, au sens vouloir faire voir quelque chose à quelqu’un, donc de ce fait imposer outre un point de vue, une vue. Non pas montrer mais faire voir, au sens plein, ouvrir un champ de vision où l’on pourrait voir non pas l’invisible mais ce qui ne se regarde jamais. Pour certains l’abstraction, d’autres la matière du monde, la sensation, l’affect dans le geste. Pour Elina Salminen, le temps. Laisser la couleur se frayer un chemin inédit, venir d'ailleurs, rebondir aux angles indiscernables avant d'exister sur la toile. Cela à la grâce d'un instant qui se prolonge. Sentir l'apparition de la couleur, s'en étonner comme d'une faveur, alors ressentir. Il faut souligner combien ces deux verbes sentir et ressentir s'appartiennent. On ne ressent des émotions, des sentiments, que pour avoir senti, avoir perçu de nos sens. Il n'est de ressenti sans mémoire. La couleur dans son épiphanie convoque, évoque alors de l'enfoui, un souvenir peut-être, à la manière de Proust alors, un temps retrouvé, qui dans sa plénitude nous ouvre à un autre moi souterrain, profond, qu'il tenait pour le vrai moi. Sentir la couleur, en supposer les ondes et ses répliques, ressentir son écho en nous.
Comment passe-t-on du motif (peindre sur motif, exploiter un motif récurrent) à la recherche, l’invention d’une couleur ? De représenter à figurer, à évoquer, à faire sentir et ressentir.
Ne pas, ne plus montrer donne une responsabilité à celui qui regarde la toile, seul il décidera s’il y a à voir, s’il y voit, si ce tableau le regarde. S'il saura profiter de l'avènement qui s'y joue pour laisser percer l'événement intime. Il n’y a plus d’évidence de l’objet, il ne saute pas aux yeux, il y a de plus en plus une évidence de la peinture elle-même. / Claire Ponceau
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